Langues étrangères : plus on commence tôt, plus c’est facile… Mythe ou réalité ?

Langues vivantes et petite enfance : Plus on grandit/vieillit, plus c’est difficile 😭 !
Entre l’acquisition passive💅et le besoin de faire des efforts🥵, le choix est vite fait !

L’apprentissage des langues fait souvent couler beaucoup d’encre : pas la bonne méthode, des classes trop chargées, un enseignement trop abstrait, des compétences inutiles « dans la vraie vie », « pourquoi apprendre une langue étrangère alors que les élèves devraient déjà apprendre à parler correctement français », etc. Chacun a son opinion.

Mais alors, quelle est la bonne méthode ? 🤔

Une seule certitude : commencer tôt fait des merveilles !

Et quand je dis tôt, c’est tôt ! Faites confiance à vos bébés ! Les tout-petits ont une faculté d’apprendre insoupçonnée : plasticité du cerveau, capacité de discrimination des différents sons et intonations, réflexes d’adaptation en situation de découverte… C’est l’âge d’or ! Et ces caractéristiques propres à l’âge et au développement neuronal disparaissent bien vite.

Le rejet de l’inconnu : conséquence du passage de la découverte à chaque instant (chez les tout-petits) à un environnement connu et maîtrisé (chez l’enfant)

À mesure que l’enfant quitte l’âge de la découverte (pour entrer dans celui de la maîtrise : sociale, scolaire, mathématique, langagière, etc.), l’inconnu devient un obstacle. Lorsqu’un tout-petit [qui je le rappelle possède une plasticité cérébrale qui lui permet de discriminer les sons de manière totalement passive et ainsi de différencier les phonèmes de deux langues distinctes sans le moindre effort] est exposé à des mots qu’il ne comprend pas en langue étrangère (et donc à l’inconnu), il va mobiliser les mêmes réflexes de compréhension que ceux qu’il mobilise déjà d’habitude pour sa langue maternelle : décodage de la gestuelle pour comprendre ce dont on parle, répétition, imitation, prise en compte de l’intonation, utilisation du contexte / paratexte, décryptage des illustrations, etc. L’inconnu* [la langue étrangère] ne lui fait pas peur car ce n’est qu’un apprentissage supplémentaire au sein d’une vie faite de découvertes et d’apprentissages. Le tout-petit accepte l’inconnu qui est pour lui source d’apprentissage et il maîtrise la posture à adopter pour contourner ce qu’il ne comprend pas. Ici, c’est lui l’expert !

Exemples :

  •  📖L’histoire du soir : les bébés ne comprennent pas la majeure partie des mots de l’histoire. Ils utilisent les images, nos indications, nos émotions, les intonations, les rythmes, etc. pour accéder au sens. Ils ne bloquent pas leur compréhension lorsqu’ils rencontrent un mot inconnu mais s’adaptent et accèdent au sens. D’ailleurs, ils sont de vrais experts pour remarquer que leurs parents essaient de sauter une page pour avancer l’heure du coucher !
  • 🗣️Acquisition du vocabulaire : les bébés observent leurs parents et déduisent les mots à partir de la répétition des moments du quotidien (ex. : tu veux un biberon ? = c’est par la répétition de cette question chaque jour associée à un geste et à une conséquence que l’enfant comprend le mot biberon puis, à terme, le répète d’abord en babillage puis en respectant les phonèmes employés).
  • 🦜Conversation : les bébés parlent ! Dans une langue que nous ne comprenons pas mais ils parlent. Qui n’a jamais eu de grande discussion avec un bébé en plein babillage ? Ils nous imitent, acquièrent puis reproduisent en tâtonnant pour que nous comprenions ! Petit à petit ce babillage devient plus clair et à terme, les phonèmes sont maîtrisés.

L’enfant face à l’inconnu

Lorsque l’enfant grandit (+/-7), il a déjà compris/acquis beaucoup de choses. La découverte devient raisonnée et les situations de découvertes sont introduites avec des mots et concepts qu’il connaît déjà et qu’il met à profit pour progresser en toute sécurité ; la part de l’inconnu est fortement réduite – un peu comme nager avec une bouée. Lorsqu’une LV est introduite, l’enfant perd les repères qu’il a dans sa langue maternelle (perd sa bouée) et c’est parfois la chute : « je ne comprends rien » / « je n’y arrive pas » / « ça veut dire quoi »… Tous les réflexes de déchiffrage / décodage / compréhension / adaptation sont oubliés ! Pire, c’est vexant de devoir repasser par là. L’enfant a grandi et ne sait plus mobiliser l’insouciance qui lui a permis d’acquérir de nombreuses compétences sans s’en rendre compte.

Des stratégies nécessaires pour que l’apprentissage soit efficace et laisse une trace

Dès lors, l’apprentissage de la LV doit être modifié et passer par des stratégies de soutien et d’adaptation – tant de la part de l’enseignant que de la part de l’enfant. C’est à ce moment que l’effort conscient va faire son entrée. Plus on grandit, plus l’apprentissage nécessite un comportement actif de la part de l’apprenant.

Par exemple, pour une lecture guidée, l’enfant devra réapprendre à utiliser les éléments de paratexte d’une histoire : regarder les images, repérer les mots simples déjà connus, déduire l’importance d’un mot, d’une répétition ou d’une intonation, écouter activement (pour permettre à l’adulte d’orienter sa lecture selon les réactions présentes sur le visage de l’enfant), etc. C’est ici que l’enseignant joue pleinement son rôle de soutien en permettant à l’enfant de prendre conscience de ce qu’il faisait lorsqu’il était petit pour comprendre les histoires qu’on lui lisait dans une langue qu’il découvrait. Là, l’enfant devra souvent apprendre à lâcher prise et accepter de reprendre des réflexes qu’il a fièrement quittés dans sa langue maternelle (il peut lire sans images, comprendre des textes plus complexes, etc.). En grandissant, ces stratégies de contournement, jadis inconscientes, doivent être mises en œuvre délibérément par l’enfant (qui se retrouve en situation d’effort).

Quand l’IRM nous en apprend plus sur le bilinguisme

Les nouvelles technologies d’imagerie cérébrale** permettent d’ailleurs de comprendre les mécanismes qui font que plus on grandit, plus devenir bilingue sera une tâche compliquée qui demandera des efforts bien plus intenses que lorsque la langue étrangère est introduite dès la petite enfance. Régularité et implication [en anglais, « commitment »] deviennent les maîtres mots de l’apprentissage et les aires du cerveau activées ne sont plus totalement les mêmes puisqu’on se retrouve dans une situation d’apprentissage actif et d’effort. De la même manière que l’enfant raisonne les mathématiques qui lui sont expliquées, il devra « raisonner » la langue étrangère : confrontation des systèmes langagiers, moyens mnémotechniques, apprentissage systématique, listes, etc. Autant de stratégies déployées qui n’étaient pas nécessaires au petit enfant.

Cette perte de plasticité se retrouve aussi dans d’autres matières avec le rejet progressif de l’investigation : l’enfant attend le code qui lui est nécessaire pour déchiffrer et n’essaie pas d’y parvenir par lui-même. D’autres systèmes scolaires mettent l’investigation au centre de l’apprentissage et les résultats en langue vivante y sont bien meilleurs – tant au niveau de la maîtrise linguistique que de l’accent. Causalité ou corrélation ? Ces pays sont également ceux où les films sont le plus souvent retransmis en VO et où la traduction (VF chez nous) est délaissée au profit de l’adaptation (VOST). Cette exposition permanente [= immersion] et cette nécessité de continuer à s’adapter à l’inconnu, même en grandissant/vieillissant, sont bien souvent encore à l’opposé de nos habitudes scolaires et sociales.

En conclusion ?

Plus on permet à un enfant de s’éveiller aux langues tôt, plus la suite sera facile. Alors, n’hésitez plus et si l’opportunité s’offre à vous, foncez !

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* accepter l’inconnu ne signifie pas que l’inconnu ne fait jamais peur. Ici, l’inconnu est une situation habituelle puisque le tout-petit découvre absolument tout ce qui l’entoure. Un inconnu non habituel (bouleversement des habitudes, déménagement, nouvelle école, personne étrangère) présente une nouvelle situation qui peut faire peur au tout-petit. L’inconnu de l’apprentissage d’une LV est rencontré dans un contexte habituel de découverte.

**Michèle Kail, Psycholinguiste et directrice de recherche au CNRS – Kail, M. (2016) . La plasticité : une clé pour les apprentissages langagiers tout au long de la vie. Administration & Éducation, N° 152(4), 41-48. https://doi.org/10.3917/admed.152.0041.

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